Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

LA RÉPUBLIQUE; LA CONVENTION 303

sion contre chaque membre, lorsque le corps social est opprimé. —(ATT. 35. Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple et pour chaque portion du peuple le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs !. » Et le principe n'était point une nouveauté. L'art. 2 de le Déclaration de 1789 énumérait ainsi les droits de l’homme : .« Ces droits sont la liberté la propriété, la sûreté et la résistance à loppression: » Les constituants euxmêmes avaient emprunté ce principe à Locke, ‘qui l'avait développé ex professo dans son Essai sur le gouvernement civil (ch. xvinr, $$ 202 et suiv.). Il est vrai que celui-ci paraït exiger ($ 205) que l'insurrection émane de la majorité des citoyens : « Si les actes illégaux (du gouvernement) se sont: étendus à la majorité des citoyens, ou si les méfaits et l'oppression n'ont pesé que sur quelques-uns mais dans de telles conditions que ce précédent et ses conséquences semblent menacer tout le monde et que tous, dans leur conscience, sont persuadés que leurs droits sont en danger et avec eux leurs biens, leur liberté, leur vie et peut-être aussi leur religion, comment pourraient-ils être empèchés de résister à la force illégale qui est employée contre eux, je ne puis le comprendre. » Mais de pareilles restrictions sont bien faibles. La Déclaration de 1793 appelle à l'insurrection chaque portion de la nation. Elle ÿ met bien encore pour condition « que le gouvernement viole les droits du peuple ». Maïs comment le peuple va-t-il entendre ses droits ? N’usera-t-il de l’arme terrible qu’on met entre ses mains que lorsque ses droits légaux seront violés ; ou ne l’emploiera-t-il pas aussi lorsque ses représentants nesuivent pas sa volonté, qui est le droit suprême) C’est dans ce dernier sens qu'il interprète la théorie. De là sont issues toutes les journées de la Révolution ; et, une fois l'emploi de la force admis pour faire triompher un idéal politique, on ne s'arrêtera pas là. Avec l'appui de l’armée, ce que le peuple a fait, le gouvernement le fera. Ge sera l’ère des coups d’État : Fructidor et Brumaire.

1. Duguis et Monnier. Les Constilutions et les principales lois politiques de la France depuis 1789, p. 69.