Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

LA RÉPUBLIQUE; LA CONVENTION 305

les grains qu'elle appelait une propriété nationale : « Cette « somme effrayante de 250 millions, ajoutait-elle, n’est pour « l'État qu'une avance fictive qui met à sa disposition des ri« chesses réelles et vraiment nationales, lesquelles n’appartien« nent en toute propriélé à aucur membre distinct du corps social, « non plus que les pernicieux métaux frappés aux coins moné« laires. » On n’a qu’à se rappeler de même un discours de Robespierre à la même époque : « Le premier des droits est celui de l'existence ; la première loi sociale est celle qui garantit à tous les membres de la société les moyens d'exister, toutes Les autres sont subordonnées à celle-là. C'est pour vivre d’abord que l'on a des propriétés; iln’es£ pas vrai que la propriété puisse êlre jamais en opposition avec la subsistance aussi sacrée que la vie elle-même. Tout ce qui est nécessaire pour la conserver esl une propriété commune à la sociéte entière, il n'y a que l'excédent qui soit une propriété individuelle et qui soitabandonnée à l'intérèt des commerçants. » Dans une note écrite au commencement de l’année 1795 et adressée à la Cour de Vienne, Mallet dit encore, parlant de l'état des partis après la chute de Robespierre : « La seule de ces cabales, qui méritât le nom de faction il y a quatre ou cinq mois, est celle de la Montagne ou des Jacobins. Elle avait hérité du génie, des mesures de Robespierre et se proposait de continuer sur sestraces le régime révolutionnaire et exterminateur. Là était le siège du sans-culottisme, du pillage universel des propriétés et des sentences de mort contre les propriétaires sans distinction. Les Jacobins tendaient à la loi agraire, à la communauté des biens et des pouvoirs et à l'institution d’une démocratie agricole, militaire et conquérante : ils avaient déclaré la guerre au commerce, aux arts, à l'industrie et voulaient changer la France en une république de soldats-laboureurs *. »

Ces vues ne se trouvent point dans les écrits de Morris. Il se plaint à plusieurs reprises du peu de respect qu'ont les hommes de la Révolution pour les propriétés privées ; mais c’est tout. Les mêmes idées apparaissent, au contraire, quoi-

1. Mémoires, t. IE, p. 117. 20