Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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_disaient-ils, «qu'iln’y a point de propriété » et qu’ils devaient mettre le peuple en possession et en jouissance « du bonheur commun »... Ces actes d’un délire, qui surpassait tous les délires précédents de la Révolution, étaient constatés par de nombreuses pièces saisies !. »

L'idéal de la Révolution en matière de propriété a été tout autre. C'était la réduction des fortunes individuelles à un taux moyen et médiocrement élevé, non l'abolition de la propriété privée. C'était la médiocrité, la modération, la frugalité que les philosophes du xvrrit siècle, et même Montesquieu ?, avaient prônées et décrites comme la loi naturelle des républiques: Mallet du Pan nous parait plus rapproché de la vérité lorsqu'il dit : « C’est ainsi que cemmençait à éclore, à cette époque, le dogme de l'égalité des propriélés, dont la Révolution avait déjà échauffé les germes. » Il cherche, il est vrai, à montrer par les actes mêmes de la Convention, sa doctrine socialiste : « Ces dogmes ont reparu avec éclat depuis dans les décrets de l’Assemblée qui ont eu pour objet la subsistance des patriotes: ils ont reparu surtout dans la fameuse loi de taxation, aussi bien que dans la diffamation préparatoire des propriétaires désignés d'avance à la haine du peuple, sous le nom d’accapareurs ou de muscadins, comme les nobles et les prêtres l'avaient été sous le nom d’aristocrates et de calotin ?. » Mais ces mesures ou ces pratiques, si exécrables qu'elles soient, peuvent s'expliquer aisément, sans qu'il yait besoin de recourir aux principes socialistes.

En réalité, dans cet ordre d'idées, la Révolution a voulu et tenté deux choses. Elle a voulu démembrer, morceler la grande propriété foncière, et la vente des biens nationaux, comprenant l'ancien patrimoine ecclésiastique et les biens confisqués des émigrés et des condamnés, lui à fourni amplement les moyens de réaliser cette pensée. Elle a, d'autre part, condamné le rentier, l'homme qui ne vit que de l'intérêt de l'argent placé, et surtout le banquier, et l'agioteur, celui qui

1. Mémoires, t. IL, p. 118 et 120. 2. Esprit des Lois, liv. V, ch. 1v à vu. — 3. Mémoires, t. I, p. 400.