La représentation des aristocraties dans les chambres hautes en France : 1789-1815

LA NOBLESSE NOUVELLE 247

Saint-Ouen a permis cette confusion, et la Charte édicte: « La noblesse ancienne reprend ses titres ; la nouvelle conserve les siens... » (1). Par là elle lie « tous les souvenirs à toutes les espérances en réunissant les temps anciens et les temps modernes » (2). Dans ses hauts grades, l’armée a presque tout entière été anoblie par l'Empereur. L’injure serait trop grave, la politique trop malhabile d'ajouter à ses griefs quand toute l’Europe monarchique coalisée a consacré ses titres et sa gloire. La société civile serait elle-même atteinte dans ce que Chateaubriand appelle « ses intérêts moraux révolutionnaires », et le gouvernement s’attache encore à ne les pas trop froisser inutilement. Au reste, l’article 71 de la Charte qui ratifie les titres de la nouvelle noblesse énonce : « le roi fait des nobles à volonté »; et comme cet article suffit à rétablir les titres abolis par le décret du 19 juin 1790, on peut admettre qu’il consacre en masse, au titre royal, tous les anoblis de l'Empire. « Au fond, observe Mahul (3), c'était ajouter à la puissance de l'institution. Après une suspension de plus de vingt ans, durant lesquels s'étaient élevées tant d’illustrations ou de fortunes nouvelles, le pouvoir monarchique trouvait son intérêt à réparer par une nombreuse recrue les pertes sanglantes que les guerres et les pros-

(1) Art. 74. (2) Préambule de la Charte. (3) Op. cit., p. 658.