Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

234 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

notre artillerie fit des merveilles, nous repassämes l’Aube, dont les ponts furent rompus.

L'Empereur conçoit alors et exécute un nouveau plan de campagne; il projette de se lancer sur les derrières de l’ennemi, espérant que les Alliés marcheront en forces sur lui et que, par ce mouvement, il attirera le gros de leurs forces et éloïgnera le champ de bataille du voisinage de Paris. Mais les souverains alliés, qu’il avait repoussés bien au delà de Troyes et qu'il avait laissés en présence des 30 000 hommes de Macdonald, qui déjà s’était replié sur nous, prirent la résolution de marcher sur Paris (1). Ils donnèrent rendez-vous à leurs corps d'armée pour le 28 mars, à Meaux, et décidèrent que Winzingerode, avec toute sa cavalerie et son artillerie, suivrait Napoléon sur Saint-Dizier, en se tenant constamment en queue et en prenant toutes les mesures imaginables pour lui persuader que l’armée tout entière le poursuivait.

Ce plan ne fut que trop bien exécuté : Winzingerode parvint, par son attitude, à en imposer à l'Empereur, au point que Napoléon crut qu'il avait devant lui toute la grande armée. Fatale erreur! car tandis que nous étions occupés dans la vallée de Vassy à faire des marches et des contremarches,

(1) Dans un conseil de guerre tenu le 23 mars à Pougy, chez l’empereur de Russie, il fut donné lecture de dépêches saisies et faisant connaître les projets de Napoléon : il fut décidé que Schwarzenberg, sans s'inquiéter de ce qui se passerait sur ses derrières, se porterait sur Paris conjointement avec Blücher. (Note de l'éditeur.)