Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

262 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

fâcheux augure; cependant, il prend quelques mesures, dont la connaissance se répand bientôt; il fait échelonner les troupes depuis Bourg et Poligny jusqu’à Lons-le-Saunier : l'esprit public se ranime. Il ordonne à Bourmont de faire confectionner des cartouches et des munitions; il prescrit au préfet de fournir tous les chevaux nécessaires pour les attelages du parc d'artillerie, qui doit être mis le plus promptement possible en mouvement. Il y a deux divisions dont il faut remettre le commandement dans des mains sûres. Bourmont offre des garanties : le maréchal le prend. Mais à qui confiera-t-il l'autre division? Après quelques hésitations, il se souvient qu'un vieux général républicain, couvert de gloire et de blessures, disgracié par Bonaparte et relégué dans ses terres, se trouve aux environs de Besançon : c’est Lecourbe (1). Ill’envoie chercher et lui dit en ma présence : « Lecourbe, je te connais, tu aimes ta patrie : tu ne peux laisser rallumer la guerre civile en France. Bonaparte a abdiqué. Il n’a que 4 000 hommes avec lui. Tu ne lui dois rien : voulant que tous les services fussent pour sa personne, il Ca relégué dans tes terres; viens avec nous; patriote, tu ne peux refuser ce service à ton pays. Il vient nous apporter la guerre civile : il faut donc que tu prennes une de mes divisions ; Bourmont

(4) Le général Lecourbe, rayé des cadres après le procès de Moreau, avait été réintégré dans son grade par Louis XVIII. (Note de l'éditeur.)