Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

L'ASSASSINAT (1812). 341 des orages révolutionnaires, avait félicité officiellement Napoléon sur ses victoires. Le cardinal Maury, l'ami et l'amie de Paris, convertis à leur tour par le succès, faisaient partie de l'entourage impérial. En Allemagne, Jean de Müller avait ouvertement trahi sa cause, et venait de mourir conseiller de Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie. Les souverains que d’'Antfraigues avait servis, comme les individus qu'il avait aimés, semblaient renier ses idées et accuser sa conduite. L’Autriche livrait à Napoléon une de ses archiduchesses; la Prusse était abattue aux pieds du redoutable « Scipion » dénoncé par le faux Polybe, et « Arsace » aspirait à partager avec lui l'empire du monde. La Suède adoptait pour son futur souverain le général qui l'avait arrêté, lui, d’Antraigues, à Trieste, au nom de la république.

Ainsi déçu dans ses espérances politiques, le mari de la Saint-Huberty l'était encore dans ses affections privées. Sa femme, vieillie et aigrie, ne se résignait pas à n'être plus, même dans le monde, une artiste célèbre, et les caprices de son humeur retombaient sur l'homme qui n'avait pas réussi à lui donner, hors du théâtre, de l’importance et de la considération. On la disait avare, quoique sa fortune personnelle, jointe à la pension du gouvernement anglais, assurât au ménage une certaine aisance. Leur fils touchait à sa vingtième année; il échappait à ses parents sous je ne sais quelles influences, et au moment de leur mort n'habitait plus avec eux. D'Antraigues nous a révélé ses tristesses intimes par un fragment de « Confessions » trouvé dans ses papiers et écrit le 1° janvier de cette année 1812 qui devait être la dernière de sa vie. Nous citons seulement les principaux passages de ce soliloque incohérent et désespéré, page vivante et plus honorable à la mémoire de son auteur que