La correspondance de Marat

4x LA CORRESPONDANCE DE MARAT

tieux redoutable, tramer contre le gouvernement, ou, en hypocrite adroit, corrompre les mœurs de la nation. À ces deux égards, l’imputation de mes adversaires est la plus ridicule de toutes.

Si je ne remplis pas mes engagements, je consens à ne recueillir d'autres fruits de mes travaux que l’indignation publique. Qu'on propose le même arrangement à mes adversaires, et qu’on voie s’il en est un seul qui y souscrive.

Je me lasse à combattre des chimères. Mais, mon ami, à la malignité des imputations que mes adversaires m'ont faites, je dois m’attendre aux dernières noirceurs. Il est possible qu'ils aient aussi calomnié en moi l'honnête homme. Qu'ils me calomnient, à la bonne heure, c’est leur plus douce occupation; mais c’est aux personnes respectables, dans l'intimité desquelles j'ai vécu, à rendre justice à mes sentiments religieux, à mes mœurs, à ma conduite. Je vous fais donc passer des témoignages qui ne seront certainement pas suspects. J'en aurais grossi la liste, si la plupart de mes connaissances n’étaient encore à la campagne. Mais j'espère qu’elle sera jugée plus que suffisante pour démontrer que je suis un homme de bien dans la plus rigoureuse acception du terme.

Jevaisremettre de pareilstémoignages à Monsieurlecomte d’Aranda, en le priant de vouloir bien prendre lui-même de plus amples informations auprès de ces personnes respectables, et de les adresser à Monsieur le comte de FloridaBlanca. Voilà enfin ma tâche faite. Pour couronner la vôtre, il ne vous reste qu’à présenter ma justification à ce sage ministre, en le suppliant de ma part de la mettre sous les yeux du Roi. Heureux, trop heureux d'avoir à être jugé au tribunal de sa sagesse et de sa justice.

Je vous embrasse de toute mon âme,

Mara. Paris, ce 20 novembre 1183.