La Révolution française (1789-1815)

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rément, contre le droit du peuple ou des électeurs, dont la majorité voulait la monarchie, mais pour sauver la France des fureurs de la réaction et pour conserver la Répubiique.

Il n'est pas possible de trouver un exemple plus frappant des illusions que peut inspirer la théorie qui attribue au peuple la clairvoyance et la rectitude suprèmes en politique, et qui reste désarmée en face des attentats des fauteurs de monarchie ayant le peuple lui-même pour auxiliaire.

La conduite du grand Carnot, qui, en cette circonstance, préféra perdre la République plutôt que d'enfreindre la volonté de la majorité électorale, et s'opposa au coup d'État (on sait qu'il fut décrété avec les pires monarchistes), est le type le plus caractérisé et le plus déplorable de cette sorte d'hallucination, incurable sans aucun doute, puisque de nos jours, après l'effroyable exemple d'incapacité que donna le suffrage universel en 1851, en faveur de Napoléon III, on voit encore des personnes considérables nier au Gouvernement le droit et le devoir de rectifier par l’autorité dont il dispose ces aberrations funestes.

Voici ce qu'on lit à cet égard dans une brochure de M. Henri Martin, destinée à la plus grande publicité :

« Mais, si nous étions vainqueurs au dehors, l'intérieur de la France était plus troublé que jamais. La réaction, vaincue naguère les armes à la main, en vendémiaire, par Bonaparte, avait remporté la victoire dans les élections. Le peuple n’avait pas encore la pleine conscience de ses droits et de ses intéréts politiques. Il votait peu el laissait des minorités disposer de son sort. Les Assemblées (Anciens et Cinq-Cents), non pas royalistes en majorité, comme on l'a dit, mais aveuglément réaction-