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une unité absolue. C’est le secret du fait que l’atmosphère de la représentation peut s’épanouir dans une théatrâlité prise dans le meilleur sens du mot. Deuxièmement: que le jeu s’élève au-dessus du texte est l'élément déterminant de la représentation. Précisons-le: ce jeu ne néglige pas le texte, mais il ne le considéré pas non plus comme l’élément le plus important des manifestations théâtrales. Parmi les mouvements, les gestes et les actions nuancées, le texte n’est qu’un des moyens d’expression. Cet ensemble a en effet de riches aptitudes relevant du domaine de la méta-communication; pour nous exprimer plus clairement, les membres de la troupe peuvent dire plus par la manière dont ils récitent leur texte que par ce qu’ils disent. Bref, ils font du théâtre.’’ Les deux premières suivantes ( Exercices de style, d’après l’oeuvre de Raymond Queneau et Les Trois mousquetaires, adaptation musicale du roman de Dumas pere) ont élargi le spectre du théâtre dans le sens de l’enjouement; la première a remporté un
succès éclatant et continue à en remporter même aujourd’hui, tandis que l’autre n’a pas obtenu de succès. La comédie Comme il vous plaira de Shakespeare, dans la mise en scène de Gábor Székely, satisfait, quant à son genre, au besoin du grand public, mais c’est surtout l’élaboration soigneuse des rapports du couple Rosalinda - Orlando qui en constitue la valeur principale; c’est pourquoi l’interprétation très forte de Dorottya Udvaros au rôle de Rosalinda est devenue l’attraction centrale du spectacle. La représentation de la pièce Le Retour de Harold Pinter a été un important pas en avant dans le théâtre hongrois vers la présentation sans fard des dimensions cruelles de la coexistence humaine; la mise en scène, basée sur une analyse précise et nette de l’oeuvre par Tamás Ascher a abouti à un jeu d’ensemble d’un haut niveau où excellaient avant tout deux acteurs, notamment Tamás Major dans le rôle de Max et Erika Bodnár, dans celui de Ruth. Les dernières créations de cette premiere saison ont été deux pièces en un acte, La Sa-
inte famille de György Schwajda et L’Etrange après-midi du docteur Burke de Ladislav Smocek (mis en scène par Gábor Zsámbéki); l’oeuvre de Schwajda est une pièce hongroise contemporaine, traitant des problèmes actuels qui existent entre les différentes générations. Parmi les premieres de la saison 1983-84 (György Spiró: L'lmposteur, Molière: Les Femmes savantes, John Ford: Dommage quelle soit une garce, Boulgakov: La Fuite, Gozzi: Le Roi-cerf, deux méritent d’être relevées. La pièce de György Spiró, L'lmposteur - qui a d’ailleurs obtenu le prix du meilleur nouveau drame hongrois de la part des critiques - en utilisant une thématique polonaise du XIX e siècle, présente le rapport complexe du théâtre et de la politique, celui de l’artiste et du pouvoir. La valeur exceptionnelle de la représentation, mise en scène par Gábor Zsámbéki, résidait avant tout dans le jeu magnifique de Tamás Major, un des artistes les plus importants du théâtre hongrois depuis la Deuxième
Guerre mondiale, dans le rôle principal. Pourtant, le spectacle le plus remarquable de la saison a été la présentation de La Fuite de Boulgakov (mise en scene par Gàbor Székely) qui a obtenu de la critique le prix de la meilleure représentation de la saison. C’est justement par ce spectacle, par la profondeur et la richesse de la représentation des tragédies humaines que la théâtre a réussi à atteindre de nouveau les mêmes sommets qu’avec Le Génie des Forets. Une qualité spéciale de la représentation: le jeu collectif d’un très haut niveau s’intégre, dans une unité parfaite, à une scénographie exceptionnellement ambitiense. La saison 1984-85 n’a pas donné de spectacles dont le niveau aurait pu atteindre celui des deux saisons précédentes. Parmi les pièces montées (Jerry: Übu-roi, András Forgách: Le Joueur, d’après l’oeuvre de Dostoïevski, Kleist; Amphitryon), c’est Übu-roi qui représente le plus les tendances caractéristiques du théâtre. La mise en scène de Gábor Zsámbéki rompt avec l’interprétation habi-
tuelle de la pièce, en tant que parabole politique ou pamphlet, à la mode à partir du milieu du siècle, et met l’accent plutôt sur le danger de la vulgarité qui pénètre de plus en plus la vie quotidienne. La premiere représentation de la saison 1985-86 fut Coriolan de Shakespeare dans la mise en scène de Gábor Székely; empreinte d’une conception réfléchie et impressionnante, elle est très fortement organisée autour du Coriolan plein de force de György Cserhalmi. La critique a été presque unanime à reconnaître les qualités de la représentation. Les Trois soeurs de Tchékhov, dans la mise en scène de Tamás Ascher, a obtenu un enthousiasme encore plus fort de la part des critiques et en outre, un succès tout a fait exceptionnel de la part du public. Il nous semble en effet que du point de vue de la complexité de la représentation des humains et de celui de l’expression pure de la pensée artistique, c’est ce spectacle qui a réussi à parvenir au niveau atteint préalablement par Le Génie des Forets et La Fuite. La comé-
die de l’écrivain croate Ivan Kusan, M. Amanite évoque enfin le passé historique commun hungaro-croate a partir d’une perspective comique. La premiere nouveauté de la saison 1986/87 est Tête de poulet de György Spiró - une pièce qui commence par le meurtre d’un chat et finit par celui d’un être humain. L’auteur y cherche à reveler les manifestations actuelles des passions humaines et à affronter les émotions violentes qui vibrent autour de nous (et peut-être en nous-mêmes) dans cette vie de tous les jours, où la coexistence des gens solitaires et insatisfaits revêt souvent l’aspect de la „lutte de chacun contre chacun". Sur ce fondement il construit une tragédie qui, malgré toutes les difficultés, illustre quand-même la possibilité de la mise en valeur de la dignité humaine. Dans le programme de ces quatre saisons passées, malgré la variété des types de pièces, certains points de rencontre se dessinent; la dramaturgie russe, avec Tchékhov en son centre, Shakespeare et le drame hongrois contemporain. Et
cela n'est pas le jeu du hasard: les affinités qui s'expriment dans le choix du répertoire révèlent les aspirations les plus profondes du théâtre. Comme ce n’est pas par le jeu du hasard non plus que le Théâtre Katona József a pu se réaliser et s'épanouir de la façon la plus complète dans la représentation de deux pièces de Tchékhov ■et d’une de Boulgakov.. . □ Géza Fodor 1986
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