Colonies pendant la Révolution : la constituante et la réforme coloniale

QUESTIONS COLONIALES ET MÉTROPOLITAINES 25

obligés d'attendre la vente en France des denrées de retour; ils faisaient donc deux voyages de fournitures pour un de paiement ou deux avances pour un remboursement. Poussant le système jusqu'au bout, ils en étaient arrivés, pour s'inféoder complètement un planteur, à lui vendre toutes sortes de produits, à lui ouvrir des comptes courants à long terme, à commanditer ses plantations pour s'en assurer les récoltes ; ils en avaient fait un simple mélayer travaillant pour eux el par eux. L'exclusif avait ainsi créé une véritable exploitation du travail colonial par le capital métropoli{ain. Les colons ne désiraient rien tant que de s'affranchir de cette dépendance ; de là leurs réclamations en faveur de la liberté de commerce et leurs sympathies pour le trafic interlope. Traiter avec l'étranger, c'était tirer un profit direct de leurs plantations, sortir de la vie précaire qu'ils menaient au milieu de leurs richesses, se procurer l'argent comptant qui leur manquait toujours. Mais les négociants les tenaient comme l’usurier son débiteur; la dette était estimée à 20 millions en 1774, à 300 et même 500 millions en 1789 f.

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1. Mémoire au Ministre de Boynes, sur la Liquidation des Dettes des Colonies, s. 1, n. d. Arch. colon., Mém. génér., XXIV,

n° 57. — Broch. de Cocherel, donnée par les Archives parlementaires (XI, 40) comme discours prononcé le 29 décembre 1789. Vie. de Mirabeau, discours précité ; — de Villèle (Mém., I, 31)

dit, sans fixer une somme, que « presque tous les habitants de Saint-Domingue devaient d'avance la totalité des produits de leurs terres pour plusieurs années; certains même n'auraient pu s'acquitter qu'en vendant le sol. »