La France sous le Consulat

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ou autres actes et arrangements faits entre la République el les particuliers avant.la présente ammistie. » Les biens non encore vendus leur seront rendus, mais l'État retient dans le domaine national les bois et forêts de 300 arpents et audessus, les actions et droits de propriété sur les grands canaux de navigation, les immeubles affectés à un service public.

Les émigrés qui rentrèrent en foule à cette époque ont ainsi recouvré un vingtième de leur patrimoine, 100 millions sur plus de 2 milliards *. Quarante mille d’entre eux, à l'estimation de Bonaparte, étaient sans moyens d’existence quatre ans après. Quant à ceux qui étaient maintenus sur la liste, le gouvernement restait armé contre eux dü pouvoir discrétionnaire que lui conféraient les lois non abrogées. C’est bien ainsi que l’entendait le Premier Consul lorsqu'il écrivait, en'1804, à Talleyrand au sujet de l’émigré, Vernègues : « Les émigrés sont des hommes condamnés à mort par les lois de leur pays, et considérés dans tous les pays comme des individus morts civilement ”. » À vrai dire, la liste des émigrés demeurait toujours ouverte : on ÿ inserira encore des noms en 1807.

Telles sont les mesures par lesquelles Bonaparte s'efforçca de donner satisfaction aux besoins les plus urgents de la France. Leurs effets bienfaisants ne tardèrent pas à se faire sentir. « Depuis que J'ai cessé d'écrire, dit un contemporain *, tout est tellement changé qu’il semble que les événements révolutionnaires se sont passés il y a plus de vingt ans; les traces s’en effacent tous les jours... Le peuple n’est plus tourmenté au sujet de la décade, qui n'est plus observée que par les-autorités. On peut voyager sans passeport dans l’intérieur. La subordination est rétablie dans les

1. Taine, Régime moderne, t. I, p. 202.

2. Correspondance, t. IX, 31 mars 1804.

3. Mémoires de Dufort de Cheverny, au 1* septembre 1800, cités par Taine, Révolution, t. III, p. 364.