"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

LES ILLYRIENS AVANT « LA GUZLA ».

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de l’aristocratie vénitienne pendant près de vingt ans (1760-1780) à l’époque de l’omnipotence féminine dans les affaires politiques et administratives de la Sérénissime République. « Parvenue au déclin de l’àge, elle montra plus de tact que la plupart de ses contemporaines, qui prolongeaient leurs galanteries bien au delà de la jeunesse, ou achevaient de s’avilir en demandant des émotions nouvelles à la funeste passion du jeu. Quand Justine Wynne se sentit vieille, elle se fit ermite. « C’est alors qu’elle s’adonna à la littérature. Elle s’installa avec ses livres et ses chiens près de Padoue, dans une excentrique villa nommée Alticchiero, appartenant à son vieil ami le sénateur Angelo Quirini. Elle se mit à écrire, même à beaucoup écrire, en français et en anglais ; mais ne fit imprimer que quelques ouvrages tirés à un très petit nombre d’exemplaires. Elle nous a expliqué elle-même l’origine de ses premiers essais littéraires. « Quand j’étais jolie femme, « dit-elle dans les Pièces morales et sentimentales, « j’avais eu du moins le bon esprit de comprendre « qu’il me resterait une longue vie au delà de la vie « brillante de la jeunesse. Je consacrais à la lecture le « temps que j’avais de reste, celui que les autres fem« mes réservent à leur chien ou à leur sapajou. Heu« reusement que je n’aimais pas les bêtes alors ; je les « aime à présent, et je donne à mes chiensles moments « que je donnais alors à mes adorateurs. Les livres « me restent toujours, ainsi que quelques amis, qui « m’aident à supporter l’àge du repentir. » « Parmi ces amis, on remarquait, outre Quirini, un sénateur nommé Dandolo, qui avait été et redevint depuis provéditeur de Dalmalie, et auquel le futur auteur des Morlaques devait, sans doute, plus d’une