"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

« LA GUZLA » EN ALLEMAGNE.

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Rauber Kristitsch Mladen ». En effet, tous les héros de la ballade serbe sont personnages connus ou du moins supposés tels ; c’est leur faire injure que de mettre devant leur nom l’article indéfini. Enfin, au vers : Sprang der Mladen jetzt auf seine Fusse on trouve une expression tout à fait serbe, dont il n’y a pas l’équivalent chez Mérimée, —■ il dit simplement : « Mladin s’est levé. » Sauter sur ses pieds et sauter sur ses pieds légers est une des expressions favorites du chanteur serbe, et M. Gerhard la connaissait bien. En voici quelques exemples tirés du premier volume de la VEz/tz : Und sie sprangen auf die leichten Fusse. Springt die Jung’ auf ihre leichten Fusse. Sprang der Komnen auf die leichten Fusse \ Ainsi il illyrisait davantage la « couleur locale » de la Guzla ; mais sans le faire toujours avec le même bonheur. Il changeait des noms : Jean devenait Iwan ; fils d’Alexis: Alexewitsch; George Estivanicli : Gjuro Stewanitsch; fils de Jean : Iwanowitsch ; Hélène : Jellena; Théodore Khonopka : Todor Knopka; saint Eusèbe : der heilige Savva 2 !

1 Wïla, t. I, pp. 270, 307, 320. s Quelques-uns de ces noms accusent évidemment la collaboration de Miloutinovitch dans la confection de ce surcroît de « couleur » qui se manifeste dans la traduction de Gerhard. Ainsi, la véritable forme serbe du nom George n’est pas Gjuro, mais Djordjé. Gjuro n’est qu’un provincialisme. Il s’explique dans la traduction allemande des poèmes de Mérimée par la manie bien connue de Miloutinovitch qui, bien que Bosniaque, avait adopté le langage, les mœurs et jusqu’au costume du peuple monténégrin, plus pittoresques et plus « Spartiates » que ceux des autres pays serbes.