La patrie Serbe
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LA PATRIE SERBE } 214
Ave, Cesar, morituri te salutant. Mackensen et ses légions parurent devant la paisible majesté du Danube. 5
Derrière l'immense étendue du large fléuve bordé de peupliers qui irémissaient comme de l'or liquide, Belgrade blanche et charmeuse, Belgrade la jolie, s’étirait avec langueur. C'était une proie convoitée durant le cours des siècles, une proie pour laquelle, par millions, les hommes avaient donné leur vie. Elle semblait flotter dans une création d'azur, tel un rêve soutenu par
les eaux limpides, embrassée par Îe ciel penché sur sa.
beauté. Les cohortes germaniques ftraînaient déux mille canons. Des centaines de gueules ouvertes pour cracher la destruction se tendirent vers la délicate cité. Mackensen ne tarderait pas à accomplir son œuvre de baute civilisation. iI
Cinq fois déjà, les masses compactes, les masses grises descendues du Septentrion, avaient terni de leur présence boueuse le sourire azuré du ileuvé ; cinq fois
elles avaient été repoussées. Les gueules des canons .
vomirent le feu, le fer. En-trois jours, cinquante mille obus secouèrent la ville jusque dans ses plus intimes fondations. Les avalanches de mitraille s’écroulaient du ciel embrasé, continuellement traversé par les sillages lumineux des obus. Les maisons bondissantes paraissent jouer à saute-mouton avant de s’écraser les unes sur les autres. Ensevelis sous les monceaux de décombres, les soldats qu'on ne pouvait secourir étaient. brûlés vifs; le supplice du feu s’ajoutait à celui de la lapidation. L'incendie courait parmi la ville en longues traînées vivantes. Malgré la tourmente de flammes, les tourbillons de fumée, les défenseurs s'acharnaient à leur résistance ; ils refusaient d'abandonner la ville devenue un chaos de rues crevées, de monuments bou-
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