La Révolution française (1789-1815)
MIO
Il
On peut concevoir, en supposant à la nature humaine plus de force mentale et morale qu'elle n'en a effectivement, et à la conduite des évènements politiques plus de prévoyance et d'esprit de suite qu’elle n’en affecte d'ordinaire, que la Révolutionfrancaise aurait pu s’opérer systématiquement, par en haut, c’est-à-dire d’après l'effort d'un gouvernement suffisamment éclairé et dévoué au bien public.
Cette hypothèse est d'autant plus légitime qu'elle aurait précisément pu se réaliser si, par exemple, le grand Frédéric avait surgi à la place de Louis XVI, ou si celui-ci, seulement, avait été capable, comme Louis XIII avec Richelieu, de subir l’ascendant du ministre si parfaite ment apte à comprendre la nature, l'étendue et l'exécution de l'indispensable régénération de l'empire.
Nous parlons de Turgot, homme d'Etat véritable, qui se trouva effectivement investi de la puissance ministérielle, mais à qui l'indispensable adhésion du roi fit définitivement défaut.
La solution, dans le cas hypothétique que nous considérons, si éminemment favorable au succès de la Révolution, aurait consisté dans l'avènement au trône de France d'un roi qui, spontanément ou sous l’influence de son premier ministre, aurait sciemment et volontairement transformé la prépotence monarchique, la dictature rétrograde des Louis XIV et des Louis XV, en une dictature progressive, c'est-à-dire en une présidence républicaine caractérisée par l'institution de l’hérédité sociocratique (ou choix de son successeur par le chef du pouvoir lui-même, d'après la considération du mérite), combinée