Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

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de la place, et celle-ci revint aux Boccésiens sans aucune effusion de sang.

Le lendemain, le vladika accompagné de Sankovsky, d'Yvelitch et de tous ses chefs, se rendit sur un des vaisseaux russes jusqu'à la côte en face du monastère de Savina, où, après une cérémonie d'actions de grâces, Pierre [er consacra les drapeaux destinés à flotter sur les forteresses rendues à leurs légitimes possesseurs.

Cependant on apprit à Castelnuovo que le sénat de Raguse avait l'intention de donner passage sur le territoire de la république aux Français destinés à l'occupation des Bouches. Immédiatement , le vladika fit prier les Ragusains de n’en rien faire, etil envoya en même temps Belli pour s'opposer au débarquement des troupes françaises. Segnavine, apprenant ce qui élait arrivé, envoya alors quelques compagnies et de l'artillerie pour garder Caltaro et Castelnuovo, et lui-même arriva bientôt dans les Bouches avec tout le reste de la flotte, Ayant pour lui un port aussi assuré, il forma audacieusement le projet de transformer la guerre de défensive en offensive, et d'interrompre les communications entre l'Italie et la Dalmatie. Il songeait à cet effet à employer les nombreux vaisseaux Boccésiens qui, par leur faible tirant d'eau, pouvaient pénétrer dans les moindres baies, et circuler partout au milieu des îlots des Archipels Dalmates. Une fois les communications maritimes enlevées aux Français, que deviendraient-ils dans un pays où la difficulté des communications rendait presque impossible le passage de l'artillerie et le transport du matériel et des munitions? Le général en chef français disposait de quarante mille hommes; mais il n’était pas un point dont il ne dût assurer la possession en y laissant un détachement plus ou moins considérable ; il ne pouvait donc espérer d'atteindre les Bouches avec plus de vingt mille hommes, et ce nombre était insuffisant pour s’y établir. Ségnavine donna donc à Belli l’ordre d’aller s'emparer de l’Archipel Dalmate ; quant à lui, il alla se ravitailler à Corfou, et de là il vint à Curzola rejoindre son lieutenant.