Le pacte de famine, histoire, légende : histoire du blé en France

PIÈCES JUSTIFICATIVES. — DEUXIÈME PARTIE 51

Il est bien vrai que les lettres de cachet données par le Roi l'étoient toujours sur le rapport ou la demande de quelqu'un, et il étoit très rare que le Roi en donnât une de son propre mouvement ; mais quelquefois c'étoit sur le rapport d'un autre ministre que celui qui la signoit, quelquefois à Paris sur celui du lieutenant de police. Tout le monde sait que M. de Maupeou étant chancelier, a fait donner une quantité prodigieuse de lettres de cachet. On sait aussi que la plupart des contrôleurs généraux en faisoient donner très souvent; que le cardinal de Fleury, qui se mêloit particulièrement des affaires de la religion, et après lui ceux qui ont eu la feuille des bénéfices en ont distribué une quantité immense. Or ni le chancelier, ni le contrôleur général, ni l'évêque chargé de la feuille des bénéfices, ne pouvoïient signer une lettre de cachet, et quand ils en donnoïent, cela veut dire qu’ils obtenoient pour cela l'ordre et la volonté du Roi, que les secrétaires d’État certifioient par leur signature mise au bas de la lettre de cachet et le bon de la main du Roi, l'acte de sa volonté devoit rester dans les bureaux des secrétaires d'État pour leur décharge.

C'est là ce que je pourrois repondre si on vouloit me rendre responsable d'une lettre de cachet signée par moi, mais je ne suis point dans ce cas-là.

20 L'assignation qu'on me donne n'est pas pour une lettre de cachet donnée du tems que j'étois secretaire d'État, ni signée par moi. C'est pour une donnée sous Louis XV, et signée par M. de la Vrilliere.

Le reproche qu’on pourroit done me faire est de n’avoir pas obtenu de Louis XVI de la OI pendant que j'élois son secretaire.

Mais qui sait si je n'ai pas fait des demarches inutiles pour obtenir éette revocation. Je ne le sais pas moi-même. Je sçais que le ministre en qui Louis XVI avoil sa principale confiance, .etoit beau-frere de mon predecesseur qui vivoit encore, Que je ne proposois rien au roi de contraire a ce qu'avoit fait mon predecesseur, qu'en l’en prevenant. Qu'il y a beaucoup de lettres de cachet dont j'ai obtenu, du consentem :nt de ce principal ministre, la revocation absolue : ; que pour d’autres, jai obtenu seulement un changement de lieu de leur detention souvent dans le cas tres frequent où le detenu avoit la tête aliénée, en sorte qu'on ne pouvoit pas lui rendre la liberté, que dans tous les pays du monde et dans les Elats democratiques meme, on ne donne pas aux gens qui, par le derangement de leur tête, troubleroient la société.

Je me souviens aussi que je fus autorisé par Louis XVI à donner des notes pour procurer à ceux qui etoient prisonniers les adoucissemens que peuvent desirer ceux qui sont privés de leur liberté, et sur ce cas le citoyen Prevôt en à joui comme les autres; mais je n° me rappelle aucune circonstance personnelle a lui, ou au moins je n’en ai que des idées très confuses, et dans le peu que j'en ai, je pourrois le confondre avec quelques autres,

3 Si quelqu'un dit qu'il est étonnant que je n’aye pas conservé des notes par éerit sur ceux qui étoient prisonniers de mon lems, je reponds que les notes doivent exister. Du moins je les ai laissées dans les ons pour mes suce2sseurs. Je ne sçais si jusqu'a présent on les a conservées.

(Archives nationales, T. — 770.)