Les complots militaires sous la Restauration, d'après les documents des archives
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étaient plus malheureux que leurs camarades de Paris.
Astreints à la résidence, surveillés comme des malfaiteurs, appelés, sous le moindre prétexte, devant les autorités locales, obligés, dans beaucoup d’endroits, d'aller à la messe, isolés au milieu des bourgeois dédaigneux où effrayés, ils étaient condamnés à sécher d’ennui, ou à se laisser aller aux suggestions de l’impatience et de la colère.
En outre, avec les années, la gêne augmentait. Elle pesait lourdement sur les officiers'subalternes, réduits à leur maigre pension. Déduction faite de la retenue de deux et demi pour cent, les capitaines ne touchaient que 73 francs pas mois, les lieutenants /4, les sous-lieutenant 42. Les épaulettes et la passementerie étaient depuis longtemps chez le brocanteur. Quelques-uns portaient la capote d'ordonnance dont ils avaient enlevé les boutons de cuivre, et la misère courbait ces hommesquiavaientconquis des royaumes. Si pauvres qu’ils fussent, cependant, ils savaient, à force de privations, économiser un écu pour fêter les glorieux anniversaires de leurs victoires et pour boire ensemble, entre quatre murs, à l'abri des mouchards,
au petit Tondu, et à la Grande armée ! (x).
(x) Sur la vie des officiers à la demi-solde dans les départe= ments et sur les tracasseries dont ils étaient entourés, voir : jouvenirs historiques du capitaine Krettly, ancien trompette= jor-aux guides, recueillis par Grandin, 2 vol. in-8°, P. 1839.—