Les pamphlets de Marat

48 LES PAMPHLETS DE MARAT

les vues, les desseins, les projets du Cabinet, sera sans cesse assujettie aux caprices d’une politique versatile. Ainsi, ne cherchons plus dans aucune forme d’administration le remède aux abus effroyables d’un ministère inhabile, vicieux et corrompu. Après la longue, la cruelle, la déplorable expérience que nous en avons faite, et nos pères !

4. Les maux qui nous travaillent ont travaillé nos pères : tantle Gouvernement a toujours été fidèle à ses maximes d’oppression, de vexation, d'inconduite et de mauvaise foi. Entre mille exemples de cette triste vérité que présente la longue histoire de nos malheurs, je choisirai celui des troubles qui précédèrent la guerre de la Fronde.

A la fin du règne de Louis XIII, et au commencement du règne de Louis XIV, le désordre des Finances excita, parmi la noblesse, la magistrature et le peuple, la même fermentation qu'il excite aujourd'hui; époques si frappantes de nos annales, que les mêmes personnages paraissent y figurer sous des noms différents. Philippe joue le rôle de Gaston conduit par Puilaurens; Conti, celui de Condé; le duc de Chabot, celui du duc de Beaufort; d'Arles, celui du cardinal de Retz; le Coigneux, celui de son aïeul ; d'Epréménil, celui de Broussel, etc.

Quant aux événements, ils sont communs la plupart. Les Parlements s'élevèrent contre les acquits comptants, frondèrent l’administration désastreuse d'Emeri, et le firent renvoyer par leurs clameurs, comme ils ont fait renvoyer Calonne. Ivres de ce premier succès, ils s'’opposèrent à la faxe des aisés, comme ils se sont opposés à l'impôt territorial; les payements de l'Hôtel-deVille furent arrêtés, et peu s'en faut qu'ils ne le soient à présent. Le Sénat parisien tint de continuelles séances, où les Princes et les Pairs invités se trouvèrent quelquefois. La populace ayant rempli l'enceinte du Palais, enhardi par sa présence, il parla en maître, et forca le Roi de déclarer qu'il ne ferait plus usage des lettres de cachet. Le premier ministre et Le garde des sceaux déplaisaient : l'un fut obligé de fuir, l'autre fut renvoyé, comme ils l'ont été de nos jours. Les esprits s'échauffèrent de plus en plus. Ici finit le parallèle; mais achevons le tableau. Le monarque abandonna sa capitale; le Parlement arbora l’étendard de la révolte, établit des impôts, leva une armée, et la bataille de Saint-Antoine se donna. Au milieu de tant de scènes de fureur, ce Sénat ambitieux, qui n’avait cessé de vanter son amour respectueux pour le Roi, osa traiter avec lui d'égal à égal, et bientôt il foula sous ses pieds ceux qui l'avaient élevé. Déjà la dureté de cette domination aristocra-

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