Mémoire sur la Bastille

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troubles, rassurent les gens de bien, leur promettent le retour de la paix, de la justice et de l’humanité. Rassemblés de grand matin, on nous dit tout ce qui s’étoit passé dans l'intérieur et autour de la Bastille; on nous retraça les cruautés dont j'ai parlé. Quelques-uns prétendoient que la Révolution étoit souillée dans son principe. Pour toute réponse : « Paroïssez, dit Pun de nous, paroïssez, Peillon et Geudin : en l'honneur des bons exemples, déclarez-nous ici ce que la sainte humanité, ce que la piété filiale vous ont inspiré.

— Comme tant d’autres amis de la liberté, dit M. Peillon’, je m’étois porté au siège de la Bastille. J'arrive, un honnête citoyen sortoit des cours : on le prend pour le gouverneur, on le saisit; il alloit périr. Je ne sais pas ce que j'ai fait, mais je sais bien ce que j'ai senti.

« Cent témoins, Messieurs, vous diront que j'ai prodigué ma vie pour sauver celle de M. Gaillard. Il vous le dira lui-même; et voici ses propres paroles quand je l’eus délivré : « Jeune homme, « Dieu nous regarde lorsque nous faisons une « bonne action, lorsque nous nous jetons entre la « victime et le fer de l'assassin. Va, tu trouveras « dans ton cœur la plus douce des récompenses;

1. De Grasse en Provence. (Dusaulx.)