Mémoires sur Naigeon et accessoirement sur Sylvain Maréchal et Dalalande : lu à l'Académie des sciences morales et politiques
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autres, il les eût sans difficulté acceptés et signés de son nom.
J'en citerai d'abord un, qui est comme un abrégé de la Contagion sacrée, et dont le sujet est exprimé ainsi : Problème important : La religion est-elle nécessaire à la morale et utile à la politique. I est supposé de Mirabaud: mais Mirabaud n’en est vraisemblablement pas plus l'auteur qu'il ne l'est du Système de la nature. Si je ne me trompe, la provenance en est autre, et à la marque de fabrique qu'il porte en quelque sorte, on peut aisément reconnaître la raison d'Holbach et compagnie. J'en donnerai pour preuve deux ou trois phrases, dont le sens n’est pas douteux. Ainsi il y est dit : « Celui qui ne connaît pas Dieu , on qui n'est pas convaincu, par les preuves qu'on en donne, de son existence, connaît au moins la nature, et ne peut douter de sa propre existence; » ce qui lui suffit pour avoir sa règle de vie; « car, ajoute-t-on, un athée s'aime luimême, et, à moins d'être dans le délire, il ne peut être insensible à l'amour ou à la haine des autres, à leur estime ou à leur mépris. Tous ces motifs, tous ces intérêts subsistent pour l'athée. » « Il ne faut donc pas fonder la morale sur un être inconcevable, ou dont chaque individu de l'espèce humaine se fait nécessairement des peintures différentes; » c'est sur une autre base qu’elle doit reposer : «€ Il faut aux hommes une autre morale que celle que la religion leur prescrit : au lieu d’une morale insociable, mystique, il leur faut une morale sociable, intelligible ; au lieu de ces intérêts merveilleux, que la religion montre à ses disciples, il faut que la raison humaine leur montre des intérêts plus sensibles, plus présents et plus réels. » Voilà la