Oeuvres politiques de Fabre d'Églantine
SUR L’AGIOTAGE ET LE CHANGE 135
l'agent prévient le banquier et revient chez lui avec les 1.500.000 livres; pourquoi cette prévenance? c’est que l’agent a gardé la lettre de change sans la payer : c’est qu'il a employé le mardi, le mercredi, le jeudi et le vendredi à semer de mauvaises nouvelles, à faire répandre des bruits alarmants, à faire exciter des troubles dans Paris, et à faire agiter le peuple à prix d'argent; tout cela pour faire baisser le change. S'il a baissé d’un demi, c’est 40 p. 100. Il vend la lettre de change à qui il veut, puisque l’endossement est en blanc. [la vend 1.650.000 livres assignats; le banquier le sait bien, le voit bien; mais il entre dans son plan et dans celui de Pitt, qu’il faut faire un pont d’or aux instruments du discrédit des assignats.
Des gains aussi faciles, aussi rapides, aussi immenses attirent à l’œuvre de l’agiotage des flots de collaborateurs, des milliers de sangsues qui viennent pomper la substance de la République. Quand on vient à songer que par le travail d’un seul jour ces vampires annihilent dans la poche de tous les citoyens utiles et laborieux de l'Etat, le prix de leur travail et de leurs sueurs; qu'ils aspirent des sommes immenses et fout ce qu’ils peuvent du Trésor national pour en faire leur proie, et dessèchent ce qu'ils y laissent; on ne peut qu'être effrayé de ce nouveau genre de guerre inconnu jusqu'ici à tous les peuples qui ont habité le globe ‘.:
Vous touchez du doigt maintenant, citoyens, toute l’étendue de cette plaie; mais, pour en sonder la profon-
1.11 faut néanmoins observer que cette manœuvre de Pitt
. nest que la répétition de celle qu'il employa pour discréditer
le papier-monnaie des Etats-Unis américains. (Nole de Fabre d'Eglantine.) ‘ '