Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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Le lendemain, la discussion se rouvrit, et Portalis prit la parole. Il n’hésita pas à repousser la résolution comme attentatoire aux droits des citoyens et au principe de la liberté des cultes. Aux rigueurs qu’elle autorisait, il opposa les déclarations impartiales et tolérantes de la constitution; il s’éleva fortement contre une proposition qui tendait à faire revivre la doctrine funeste du salut public, et qui, en consacrant de la façon la plus éclatante l’usurpation des fonctions judiciaires par le Corps législatif, ébranlait une des bases les plus solides de toute constitution libre.

Il constate que l'unique grief articulé contre les prêtres est le refus ou la rétractation du serment constitutionnel, il affirme que leur seul crime est une hostilité présumée contre le gouvernement républicain; et, comparant l’énormité de la peine à l’incertitude de la faute, il dénie à toute autorité soucieuse de ses devoirs le droit de décréter, pour un tel motif, la proscription d’une classe entière de citoyens.

Portalis demande ensuite à ses adversaires pourquoi, lorsqu'ils établissent des peines telles que le bannissement, la déportation, la réclusion des infirmes et des vieillards, ils les étendent arbitrairement à toute une classe de citoyens, au lieu d'en confier l'application individuelle aux tribunaux. Dans le cours de la discussion, on avait dit qu'à un crime d’une nature particulière il fallait une juridiction exceptionnelle, que les tribunaux se montreraient trop indulgents, et que, dans l'intérêt du salut national, il était nécessaire de laisser pleine latitude au pouvoir exé-