Poussière du passé : (notes et tableaux d'histoire)

LE CHANCELIER PASQUIER 203

scène, avec le plus rare bonheur. Dans aucun des innombrables mémoires laissés par les contemporains sur les temps du Consulat et de l'Empire, on ne trouve rien de plus supérieurement évoqué. Si javais un point de comparaison à rechercher et à établir, je dirais volontiers que ceux du chancelier Pasquier, à en juger par le premier volume, n’ont d’égal que ceux du général Marbot. C’est, avec la différence des milieux et des sujets, la même sûreté de coup d’œil, la même lumière dans les récits, la même puissance de description.

La page maîtresse de ce beau livre, la page réellement révélatrice est celle où est racontée l'intrigue dans laquelle Talleyrand se laissa entraîner par Fouché en 1808, pendant la guerre d'Espagne, et qui provoqua sa disgrâce. Napoléon venait de partir pour prendre le commandement de ses armées, en marche vers Madrid. Il avait à peine franchi les Pyrénées que, soudain, l’on vit Talleyrand se répandre en sinistres prédictions et donner à entendre que l'Empereur n’échapperait pas à la vengeance des Espagnols et ne rentrerait pas vivant dans sa capitale. En

même temps, cessait tout à coup l’ardente hos-