Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

LE COMTE DE PROVENCE ET MADAME DE BALBI. 205

comme on va le voir, définitivement disgraciée et ne pouvait plus rien pour les ralentir. Mais elle les avait vues commencer et s’en était offensée. Encore toute puissante, elle faisait les beaux jours de Coblentz. Monsieur avait promptement repris ses habitudes chez elle, comme le Comte d'Artois chez la comtesse de Polastron et, forte de ces assiduités qui amenaient dans son salon la fine fleur de la société des émigrés, sa haine était redoutable. Ici encore, il faut laisser la parole à d'Avaray :

« Guidé par un sentiment de justice, et l'on peut dire de courage, Monsieur avait voulu peu après son arrivée écrire une relation de sa fuite de Paris. En la dédiant à son libérateur auquel il prodiguait les témoignages de la plus vive reconnaissance, il avait eu grand soin de saisir mille occasions d'amener quelques traits sensibles ou flatteurs pour son amie. Il avait poussé la délicatesse jusqu'à l’associer, pour ainsi dire, à mon succès, croyant par là trouver grâce pour les sentiments que son cœur voulait répandre. Il s'était bien trompé. Chaque éloge pour moi avait été un coup d’épingle; chaque expression touchante pour elle n’avait paru qu’un affront et, de ce moment,