Récits des temps révolutionnaires d'après des documents inédits

LE COMTE DE PROVENCE ET MADAME DE BALBI. 207

et plus peut-être parce qu’elle était aimée », la traite en toute occasion avec bonté. C’en est assez pour attirer sur elle l’animadversion de Mme de Balbi.

« Un matin que j’assistais avec cinq ou six hommes à la Chemise Blanche‘ de Mme la Comtesse, voulant à tout prix amener une chose désagréable pour moi, elle tourne la conversation sur les femmes, juge leurs différents agréments, compare l’une à l’autre et, enfin, aboutit à me dire :

« — Vous ne me parlerez pas de Mme de... Franchement, c’est une idiote.

« Je n'avais en effet nulle envie d’en parler. La conversation avait été jusque-là assez vive. Je me sentais fort échauffé par quelques traits piquants qui avaient précédé celui-ci. Ce nom prononcé en imposa pourtant à ma vivacité naturelle. Je repris la discussion avec calme: je défendis mes intérêts avec mesure et ménagement et enfin, parvenant à obtenir de moi ce sang-froid qui, vis-à-vis d'une femme en colère, fait si bien l'office du persiflage, je mis bientôt Mme de Balbi hors des

1. « Elle fait matin et soir sa toilette devant tout le monde, changeant si vite de chemise, bas et robe que personne n'y voit rien. » (Histoire de l’Émigration, t. I, p. 108.)