Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

18145 — LE PROCÈS DE NEY 315

L’arrestation de Ney venait de nous jeter tous dans la stupeur; son procès s’instruisait au milieu d’une réaction affreuse. Le maréchal avait été arrêté, le 3 août, au château de Bessonis, par un capitaine, un lieutenant et quatorze gendarmes (1). Il était resté jusqu'au 15 dans la maison de ville, et était arrivé le 19 à la Conciergerie. J’attendais l'issue du procès. C’est dans un de mes voyages à Paris, que je fus admis auprès du maréchal, à la Conciergerie. Quel triste spectacle! Cependant, le prince de la Moskowa était toujours ferme: aucun abattement ne se montrait sur sa physionomie. Il me dit : « Je connais mon sort: je sais que je vais mourir; je ne crains pas la mort! Ils veulent me faire juger par un conseil de guerre... mais je suis pair de France et je ne veux pas être traité comme un tambour! » Le langage que j'avais tenu, le 14 mars, au maréchal me mettait vis-à-vis de cet illustre guerrier, auquel je portais l'affection d’un fils, dans la position la plus pénible : sa situation était une cruelle justification de mes paroles!

Le général Gründler, rapporteur du conseil de guerre chargé de juger le maréchal, m'avait fait

(1) Le château de Bessonis, aux confins du Lot et du Cantal et où Ney avait cru être à l'abri des poursuites, appartenait à un parent de la maréchale. Dans les pièces encore conservées à la mairie d’Aurillac, il n’est pas question du sabre, don de Napoléon à Ney, qui d’après Vaulabelle, l'historien de la Restauration, aurait fait découvrir la retraite du maréchal.

L’arrestation eut lieu au lendemain de l'assassinat du maréchal Brune à Avignon (2 août) et Ney arriva à Paris le jour même de l'exécution de La Bédoyère. (Note de l'éditeur.)

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