Trois amies de Chateaubriand
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vie que par les squelettes de vos illusions. Matérialisez un peu plus lamour que vous ne l'avez fait jusqu’à présent. Il me semble que cela est aussi nécessaire aux femmes qu’à nous. » Ce dernier petit bout de lettre est assez bien. Voilà, en effet, des opinions à répandre, — mais prudemment : — et Hortense savait tout cela.
Quand elle était à Florence, vu que Marcus venait de naître, elle connaissait déjà Béranger. Et Béranger lui écrivit un jour, — nous n'avons pas la lettre d’Hortense, mais, à la réponse de Béranger, on la devine : —« Vous ne voulez plus élever d'enfants; ce sont des hommes qu’il vous faut. Je vous en souhaite... Mais soyez moins difficile dans vos recherches : ne demandez pas tant de vertu, pas tant de gloire. Contentez-vous de beaucoup d'amabilité, de beaucoup de bonté, de beaucoup. d’attachement, et surtout de beaucoup de jeunesse. Vous êtes en droit d'exiger tout cela; d’ailleurs, tout le reste ne vaudrait pas la peine que vous prendriez à courir après. » Ce ton de patriarche un peu mol ne persuada pas Hortense : elle aimait les grands hommes. Mais Béranger n'était-il pas un grand homme? Oui; car, deux mois plus tard, il écrivait à cette dame qui l’appelait : « Je n'oserai jamais aller. dans ce pays. Toutefois, une chambre dans votre appartement aurait bien de l'attrait... Je finirais par croire à l'exécution de ce beau projet de mariage qui nous a tant amusés un soir. En y réfléchissant bien, je ne sais s’il n’y a pas de votre part un