Bitef

Bérénice

Si la mise en scène, au théâtre, doit jouer un rôle c'est bien dans l'art d’accomoder les chefs d’oeuvre. Parfois cet exercise est irritant quand le metteur en scène se substitue à l’auteur pour lui faire dire... ce qu’il n'a jamais dit. Et cela, d'autant plus facilement que l'auteur n'est plus là pour se défendre. Parfois c'est rare mais cela peut arriver certaines mises en scène sont »éclairantes*. Tel est le cas de celle de BERENICE que nous propose Roger Planchon.

Ecartant les exégétes anciens et modernes, Planchon n'a laissé à personne le soin de lire BERENICE. 11 l’a lu, nous dit-il, pardessus l'épaule de Racine. Et il a découvert que cette merveilluese histoire d'amour était celle de fin d’un amour. Titus n'aime plus Bérénice. Appelé à régner sur la plus empire du monde, cette mission l’accapare tout entier et l'amour d'une femme, reine étrangère au surplus, ne peut être qu’une entrave à l'accomplissement de son destin. Pour Planchon, le sous- titre de la tragédie racinienne pourrait être: »Comment s'en débarraser?« Comme Titus est bien élevé et ne peut s’abaisser à être vulgaire, il hésite, il cache ses atermoiements sous des déclarations d'autant plus passionnées qu’elles sont fausses. Il se raccroche a la raison d'Etat car c’est la seule qui compte pour lui.

Bérénice, par contre, ne se doute de rien. Sûre d’elle et de son pouvoir sur son »fiancé* (comme Ton dirait aujourd’hui), au début elle minaude et fait des grâces. Nous sommes à Versailles et les glaces de René Allio nous le rappelle de façon visible. Quand elle éalise que Titus l'abandonne sans espoir, le drame nait en elle. Cette prise de conscience est toute la tragédie.

André CAMP

THEATRE L'Avant-Scène

Le fait que BERENICE ait trois cents ans d'age, et n'a jamais cesse d’interesser ses lecteurs, ses spectateurs et ses metteurs en scene, est la preuve même qu’il s’agit d'un objet ancien peut-être, mais toujours usuel. C,est même a ce trait que l’on reconnaît les »classiques«. Il en va de même de la fourchette, qui n’est quère plus ancienne que BERENICE; et on a bien pu ajouter une ou deux uents a la fourchette, elle a traverse les siècles et se reconnaît au premier coup d’oeil comme un objet dont on sait l'usage. BERENICE, des sa première lecture, apparait ce qu'elle est; la fatigue d’une vieille liasion, et les mensonges concients ou inconscients qui accompagnent la demarche d'une rupture.

une bérénice à facettes

JACQUES LEMARCHAND

»Figaro Littéraire«

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