Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

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tenir sa fille en communauté. La pension est de 300 livres. L'entretien n’est pas plus dispendieux qu’il le serait dans sa famille. La jeune personne n’a d'autre maître que celui de dessin ; c'est une de nos religieuses qui montre la géographie, le caleul et l'écriture. Malgré cela, il y a bien des petits frais. Pour les éviter à M. Richard, qui a d’autres enfants, je n’ai pas fait difficulté d’accepter à son insu 150 livres d’un respectable ecclésiastique de mes amis, que j'ai employés en cartes, livres et autres choses à l’usage de ma fille. Elle vous prie d’agréer son tendre respect. Elle attend avec impatience la réponse à sa dernière lettre... Une de mes inquiétudes encore au sujet de cette aimable enfant est qu’on ne la sacrifie à la fortune. Sa jolie figure plaira à quelque homme, peut-être peu dans le cas d'apprécier les qualités de l’âme et avec lequel elle n’aura qu’à souffrir. Vous direz que je porte loin mes vues, mais vous les pardonnerez, j'espère, à l'amitié! »

Quelques semaines plus tard, la supérieure allait même jusqu’à insinuer au solitaire d’Ettlingen que, placée auprès de lui, sa pupille ferait son bonheur; mais on va voir avec quelle énergie, peu courtoise vraiment, M. de Butré protestera contre de semblables perspectives. En attendant, il lui dictait, en Mentor sévère, des devoirs à faire, afin de juger de son degré d'intelligence et d'instruction. Ces corrigés tardaient à venir et la bonne sœur s’empressait de dissiper d'avance, sur ce sujet, toute mauvaise humeur possible.

J. M. J. « Saint-Benoît, 1* juin 1790.

« .. Je reviens toujours avec plaisir à notre aimable enfant. Sa santé qui a été un peu altérée à une époque où les jeunes personnes ne sont pas toujours bien portantes, l’a empêché d'entreprendre aussitôt qu’elle l’eût désiré, le petit travail

! Saint-Benoît était sans doute la maison des champs de la congrégation, et se trouvait dans le voisinage de Poitiers.