Histoire des deux conspirations du général Malet

20 HISTOIRE DES DEUX CONSPIRATIONS

Si la classe des fonctionnaires publics, dont l'empire avait fait un monde à part, en dehors du droit commun, une sorte de féodalité, et qui absorbaït une part exorbitante des finances du pays, continuait à se montrer satisfaite de l’état des choses, il n’en était pas de même dans les autres classes de la société. Déjà, dans les salons de la bourgeoisie aisée, circulaient des propos où perçaient laigreur et le mécontentement. Et quant au peuple, s’il ne disait mot, iln’en gémissait pas moins, car sa misère était navrante. Il voyait ses fils fauchés comme des épis mûrs sur les champs de bataille ; et, réduit à ses seules ressources, l’ouvrier des villes et des campagnes avait grand’peine à nourrir à la maison sa femme, ses filles et les garçons qui n'étaient pas encore en âge d'offrir leur sang au vampire impérial. La pénurie des bras avait eu beau élever le taux des salaires, cela ne lui profitait guère tant le renchérissement des vivres et des objets de première nécessité avait dépassé toutes les bornes. Le sucre, le café étaientinabordables aux pauvres gens. Qu’importait à ces déshérités de la Révolution que la rente cinq pour cent fût à 93, et que les agioteurs et écrémeurs d’affaires eussent encore confiance dans un gouvernement si favorable à toutes les opérations

véreuses !