La caricature anglaise au temps de la Révolution française et de Napoléon

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un gros banquier appuyant son heureuse bedaine sur un pupitre où se pressent, les chiffres de ses recettes, les « clairs profits, » prises de vaisseaux, bénéfices sur les emprunts, gains dans l'Hindoustan : total cinquante mille livres. Et voici l’un des chefs-d'œuvre de Rowlandson, bien supérieur aux vulgaires sujets tels que Pitt détrousseur à la foire, boutiquiers qui se plaignent, estampes qui pullulent alors. La statue de Pitt tient d'une main le budget, de l’autre le gouvernail. La devise en est fière: Sic itur ad astra. Seulement, regardons le piédestal. Toutes les pierres qui le composent portent un nom: Taxe sur les chevaux, taxe sur la poudre à cheveux, taxes additionnelles, taxes sur les fenêtres, les chapeaux, les boutiques; et la plus grosse pierre s'appelle : Guerre d'extermination.

III

Quand on en est là, on fait la paix; et chacun sait combien le traité d'Amiens fut acclamé par le peuple d'Angleterre. Pendant quelques années, je ne vois pas de caricature politique très saillante, malgré une certaine antipathie contre le pacifique ministère Addington. Bientôt le retour des hostilités rend à Gillray et à ses émules toute leur verve. Seulement, leur point de mire a changé: ce n’est plus un peuple en révolution, c’est un homme maître de l'Europe. Contre lui, la haine du crayon suit et traduit les haines nationales; et cela se reconnait bien à une complication qui va peut-être surprendre.

De 1804 à 1807, la crainte de Napoléon s'associe à la crainte du catholicisme, du pape, des catholiques d'Irlande, des catholiques d'Angleterre. Le cri de »0 popery/ figure quelquefois dans la partie écrite des dessins; il les