Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916

LES DERNIERS JOURS DE MONASTIR 119

Je viens d'offrir vingt francs en billets serbes pour un morceau de pain. On n’a consenti au marché qu'à grand’peine. Quand à Mitrovitza, il y a douze jours, j'avais mangé du pain bleu, je croyais qu'il ne pouvait en exister de pire. Erreur. Ici, à Monastir, le pain est vert. Voilà quatre jours, les Serbes du colonel Vassitch en ont touché chacun une boule. Depuis deux jours, ils vivent d’eau, de racines et des rares provisions qu'ils peuvent trouver, au cours de la lutte, sur les morts bulgares.

J'ai vu passer une longue file de prisonniers autrichiens. Ceux-là arrivaient à pied du Danube. Ils marchaient depuis trois semaines. Ils pensaient, les malheureux « Enfin, nous allons atteindre Salonique, l'Angleterre se chargera de nous! » Et voici qu on ne pourra plus bientôt atteindre Salonique ! Les prisonniers vont-ils reprendre la route d’Albanie ?

Une heure. Le Gouvernement Grec, par dépêche, informe qu'il désarmera et internera tous les Serbes qui se réfugieraient