Les serviteurs de la démocratie

MICHEL DE BOURGES 267

place comme journaliste à la Revue du Cher, où il comptait parmi ses collaborateurs des hommes d'une réelle valeur. C’étaient MM. Brisson père, Paul Duplan, un esprit généreux, doublé d’une âme vaillante, puis Planet et André Ghédin, deux avocats de mérite.

Les doctrines que Michel de Bourges soutint comme tribun étaient celles qu’il avait défendues comme publiciste à la Revue du Cher. Ceci prouve, disons-le en passant, l’unité et la sincérité de sa vie politique. Tout d'abord il avait déclaré que la forme républicaine était le seul gouvernement logique de la démocratie. Jamais il n'aurait admis qu'on püt confier les destinées de la République à un général : « Vous dites souvent, s'écriait-il à la tribune, en 1851, cette société sera sauvée par l’armée. Je ne sais si je me trompe, mais je plains mon pays s’il est sauvé par l'armée, car l'armée c’est l'épée, et l'épée, si c'est Cromwell, vous aurez un protecteur; si c’est Monck, vous aurez Henri V; si c’est Bonaparte, vous aurez l'empire; si c’est Othon, Galba ou Vitellius, vous aurez le bas-empire. » Malgré ces avertissements prophétiques, on eut recours à l'épée, et toute la France sait ce qui arriva.

Le coup d’État du Deux-Décembre mit fin à la carrière politique de Michel de Bourges. Cette carrière trop courte fut celle d’un homme dont le talent toucha au génie. Ce ne sont pas sculément les amis du tribun qui s'expriment ainsi; ce sont aussi les juges les plus difficiles et les plus autorisés. Lamartine, qui se con naissait, je crois, én éloquence, a écrit dans le Conseiller du peuple : « Qu'il y avait tel discours de Michel de Bourges dont on pouvait dire : c’est un monument. » M. de Cormenin (Timon), dans son beau Livre des orateurs appelait Michel de Bourges « un véritable maître ». M. Thiers l'avait déjà surnommé « le Bridaine de la