Mémoires sur la Révolution française

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heures. Un de mes domestiques rencontra par hasard dans la rue du Roule près du Pont- Neuf, la charrette sur laquelle il était placé : il savait que cette charrette contenait des condamnés, mais il pensa mourir d’horreur en y reconnaissant le duc d'Orléans. Mon pauvre domesfique, quoique défaillant, se décida à le suivre jusqu’à l’échafaud. Il y avait peu de foule sur le chemin : le peuple commença seulement à s’assembler quand la charrette arriva devant le Palais-Royal, l'habitation du duc; jusque-là personne n'avait la moindre idée que le duc eût été jugé.On l’arrêta dix minutes sous ses propres fenêtres. Il avait l'air très-grave, me dit ensuite mon domestique, comme autrefois lorsqu'il paraissait en public pour une cérémonie. Il était très-poudré et avait fort bonne mine : ses mains étaient liées derrière le dos et son habit était jeté sur ses épaules; cet habit était gris avec un collet noir. Quand la charrette quitta le Palais-Royal, le

duc regarda la foule avec une sorte d'indignation,