Orateurs et tribuns 1789-1794
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véritable ignorance de la langue; très rares apparaissent dans ses dix-sept comédies les pensées fines ou profondes, les vers-médailles qui demeurent dans la mémoire des hommes, mais il faut lui accorder plusieurs dons précieux : le comique des situations, l'instinct dramatique, une singulière puissance de combinaison, de la vivacité, de la force et de la chaleur, et si, dans ce Philinte que M. Nisard proclame la meilleure comédie de la fin du siècle, il n’atteint pas ce grand art de répandre la gaieté sur un fonds d'idées morales, l’action, du moins, marche avec une parfaite simplicité, les événements se nouent, s'engendrent naturellement, pour aboutir à la création d’un type : l’égoïste de principe et de calcul, un de ceux que le poète a flagellés d’un trait.
Pour moi, je les soupçonne D'aimer le genre humain, mais pour n’aimer personne.
Et il avait le génie théâtral, ce Crébillon de la comédie qui disait un jour à son confrère Arnault : « Entre le moment où je vous donne celte tabatière et celui où vous me la rendez, il y a une comédie. » Et, tout en disant cela, ajoute Arnault, il improvisait une intrigue sur ce fait. Il voyait la comédie partout. La tragédie politique ne devait pas lui laisser le temps de müûrir son talent.
Cette vocation ne se développe ou n'éclate qu'assez tard. Sa nature âpre et fougueuse le jette dans les voies