Orateurs et tribuns 1789-1794
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-sa visite à Buffon offrent assurément des pages fort agréables, et Sainte-Beuve semble bien sévère en déclarant qu’il s’y montre un espion léger, infidèle et moqueur.. Oui certes, il y a un grain de moquerie, mais aussi une grande somme d’admiration sincère dans cet opus cule. Les travers de l'écrivain, sa vanité nobiliaire, l'orgueil de son œuvre, de sa toilette, ne sont point dissimulés, et après tout, il ne nous déplaît pas, à nous postérité, de lorgner le grand homme en déshabillé, de l’entendre se rengorger, quand on l'appelle génie créateur, esprit sublime : « Eh! eh! il y a de l'idée, il y a quelque chose là! » Un jour qu'il avait travaillé longtemps, et découvert un système très ingénieux sur la génération, il ouvre Aristote, et ne voilà-t-il pas qu'il trouve toutes ses idées dans ce malheureux Aristote? « Aussi, pardieu ! dit-il, c’est ce qu’Aristote a fait de mieux! » Le beau malheur, si Hérault nous révèle que ce grand homme était un peu commère, comme tant d’autres grands hommes; qu’il aimait, pendant le temps de sa toilette, se faire raconter par son perruquier et par ses gens tout ce qui se passait à Montbar, qu’il accordait grand crédit à sa gouvernante et à un Capucin laquais, le père Ignace; qu’il tenait fort à emmener son hôte à la messe et parut charmé lorsque celui-ci répondit qu'il s’emmesserait très volontiers. Hérault s’efforça d'apprendre de lui à vouloir, mais il y réussit assez mal, malgré qu'il raconte fort bien les prodiges de la volonté: « J'ai ouï dire qu'un homme qui