Portalis : sa vie, et ses oeuvres

218 PORTALIS

Autorisé par la Convention dans le but avéré de relâcher les liens de famille et d’anéantir l’autorité maritale, le divorce n’avait que trop facilement été adopté parleshabitants des grandes villes. Il n’était plus nécessaire, comme sous l'empire du droit canon, d’alléguer des faits déterminés et graves pour justifier la rupture du mariage : une simple incompatibilité d'humeur, la volonté, le caprice d’un des époux suffisait, et l’un des signes les plus graves de l’immoralité publique sous le Directoire avait été le spectacle honteux de femmes changeant de lit chaque année et se rencontrant, sans rougir, dans les salons, avec leurs anciens maris et leurs enfants de divers noms.

Devait-on tolérer la prolongation de cet état de choses et laisser la démoralisation s'étendre à l'ombre de la loi? Fallait-il, au contraire, supprimer absolument le divorce, au risque de heurter l’esprit public, sans purifier les mœurs? Portalis et les autres rédacteurs du Code Civil pensèrent qu’il importait avant tout de rendre à la loi son caractère moral et de ne pas permettre qu’elle encourageät, en les légitimant, les erreurs des passions.

Ils laissaient, il est vrai, subsister la possibilité d'obtenir la rupture des liens matrimoniaux; mais pour quelles causes? Seulement pour des faits portant au mariage la plus grave atteinte : la mort civile, supprimée depuis, et les crimes ou délits dont un époux se rend coupable envers l’autre. Que la femme commit un adultère, que le mari amenât sa maîtresse sous le toit conjugal, que l’un des deux époux subit une peine in-