Portalis : sa vie, et ses oeuvres
AU CONSEIL DES ANCIENS 47 Je maximum, la guillotine avaient inspiré à la masse de la nation la haine de la république et le dégoût de la vie politique. À Pintolérance sauvage de 1793 succédaient la torpeur qui suit les grandes crises, le scepticisme que fait naître inévitablement l'insuccès d'efforts violents et prolongés. La passion du luxe et des plaisirs débordait en débauches et en scandales; l’énorme et subite fortune de quelques munitionnaires insultait à la misère générale, et la presse se vengeait par une diffamation à outrance du long silence que la peur lui avait imposé. Nul respect de la constitution, nulle foi dans la liberté, partout la défiance et le mécontentement : tel était l’état du pays au début du Directoire. La France traversait une de ces heures critiques de la vie des peuples où les convictions cèdent à un impérieux besoin de repos et où les nations énervées courent d’elles-mêmes au-devant du despotisme né des excès de la liberté.
Quelques hommes de cœur, quelques nobles esprits venaient, avec la ferme volonté de réagir contre cette tendance funeste, au sein de la nouvelle assemblée : Boissy d’Anglas, caractère admirable, qui porta le courage civil jusqu’à l’héroïsme, le doux et ferme Siméon, le vif et spirituel Pastoret, le savant Tronchet, le solide et infatigable Barbé-Marbois, Lanjuinais, Mathieu Dumas, Tronçon-Ducoudray, Gilbert-Desmolières et d’autres encore. Portalis brillait au milieu de ce groupe d'hommes de bien qui voulaient reprendre l’œuvre de la Constituante et faire entendre la voix trop longtemps étouffée de la nation. Malheureusement, si leur