Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

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d’un projet contre-révolutionnaire, qui devait, lui disaitil, faire de Genève une petite Vendée, déclara sans déguisement, qu'il y avait bien d’autres moyens de soulager le peuple que de l’exempter de tous impôts ; que, depuis trop longtemps, les riches dévoraient sa subsistance, ou du moins insultaient à sa misère par leurs jouissances, et même par leurs aumônes: qu'enfin la destruction de l'aristocratie des lois ne serait qu’un jeu d'enfants, si l’on n’extirpait pas en même temps celle des richesses, et celle des mœurs. Puis, tout en annonçant que les nouveaux impôts risquaient d'être rejetés par l'influence de l'aristocratie; de peur que leur acceptation ne déconcertàt son complot, il choisit, pour l’exécuter, la nuit du 18 au 49 juillet 1794, la veille même du jour où ils devaient être portés à l’Assemblée du peuple, et où il savait qu'ils auraient été sanclionnés par elle.

Tout étant organisé pour l'insurrection, les rôles indiqués, et les victimes désignées; ce ne fut qu'au milieu de la nuit que les conjurés coururent aux armes, s’emparèrent des canons, et allèrent, avec de fausses clefs !, désarmer, pendant le sommeil, les citoyens dont ils redoutaient le plus la résistance et le désespoir. On prétend qu'ils eurent soin de mettre en même temps aux arrêts deux des syndies, qui n’ont pas manqué de dire que leur

! Je sais que les Révolutionnaires genevois se sont récriés avec force contre cette accusation de fausses clés, et j'ignore en effet dans combien d'occasions ils en firent usage ; mais on m'a affirmé que l'un de leurs principaux chefs, Clere, serrurier de profession, et, si je ne me trompe, l’un des Membres du premier Tribunal, se servit de fausses clés pour s'introduire à l’improviste chez M. Diodati, qui n'eut

que le temps de sortir de son lit et d'échapper à ses bourreaux.