Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

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26 avril 1792. Rouget de Lisle déclare, dans son Recueil des Chants français, qu’il a fait son chant, paroles et musique, dans la nuit qui a suivi la nouvelle de la déclaration de guerre à l’empereur d'Autriche. Or, cette nouvelle est parvenue au maréchal Luckner, à Strasbourg, à deux heures du matin, le 24 avril. Ce n’est done pas dans la nuit du 24 au 25 que fut enfanté ce chant patriotique, comme l’ont avancé presque tous les auteurs, quoi qu’en aient dit Lamartine, Alexandre Dumas et autres écrivains. Ce n’est pas non plus en s’accompagnant sur un piano que Rouget de Lisle a fait son hymne guerrière. Rouget savait jouer du violon très agréablement, et c’est avec son violon, son imagination et sa verve poétique et musicale qu’il a fait son œuvre, tantôt l’air devançant les paroles, tantôt les paroles attendant la note qu'il lui attribua. Si Rouget n’avait pas connu la musique et n'avait pas eu une grande habitude du rythme poétique, il n’eût certainement pas pu réaliser le chant que Diétrich lui avait demandé. Les chants guerriers du spartiate Tyrtée pouvaient avoir un accent bien cadencé et des paroles stimulantes pour le courage d’une nation belliqueuse ; mais ce n’était pas, ce ne pouvait pas être ce que fut La Marseillaise, le cri sublime et entraînant d’un peuple qui s’affranchissait des chaînes d’un pouvoir absolu corrupteur et corrompu.

Pour les personnes qui n’ont jamais cultivé la poésie et la musique, il est difficile de comprendre qu'un sujet quelconque, qu’un mot donné à l’esprit du penseur, peut germer subitement durant le calme de la nuit, s’y développer, revêtir une forme et, au réveil, donner une création, une poésie palpable aux yeux et à l’oreille.

Rouget à lui-même expliqué le travail intellectuel qui S’opérait dans son cerveau, etnous reproduisons un chant publié déjà avec les détails de sa conception et de son