Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

114 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

vivres de réquisition que personne ne songeait à refuser à ma qualité d'aide de camp du maréchal Ney.

Cependant, chaque relais demandait une négociation plus ou moins longue; aussi mîmes-nous quinze jours pour traverser la Pologne, la Prusse et tout le pays de Bade. Ma grosse malle devait être restée à Strasbourg; je pouvais revenir par Francfort et Mayence, mais je voulais faire ce détour pour reprendre mes effets. Ils étaient perdus. Chez les selliers de Strasbourg se trouvaient une infinité de voitures, laissées en passant par les généraux qui s'étaient rendus en Allemagne; à chacune de ces voitures était attachée une étiquette: portant ces mots : Voiture de retour. On nous en confia une et nous voilà en marche sur Paris. Parvenus dans la plaine de Lunéville, un postillon ivre, qui nous avait fait attendre, promit de nous faire regagner le temps perdu. Aussi, prenant le galop dès son départ, au milieu de la nuit et pendant que nous étions endormis, il nous conduisit ventre à terre jusqu'au moment où nous nous réveillâmes en nous sentant culbutés. La voiture brisée, les chevaux et le postillon renversés, nous donnèrent un embarras qui ne se termina que plusieurs heures après. De Lunéville à Paris, point d'accident. Mon compagnon de voyage me quitta à Meaux, ne voulant point avoir de discussion avec le propriétaire de la voiture brisée; je payai grassement le postillon pour qu'il allât dételer ses