Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

4814 — PREMIÈRE RESTAURATION | 945

la nouvelle était fausse; « Eh bien! vous le voyez, messieurs, dit Alexandre, vous parliez de l’armée; elle vous abandonne. » Le maréchal continua à nier la défection; il se leva et tout le monde limita. Tout, dès lors, semblait être remis en discussion : les maréchaux, qui représentaient l’armée, perdaient leur caractère; le roi de Rome n'avait plus de partisans reconnus. Talleyrand, par ses manœuvres, avait fait en sorte qu'il ne pouvait plus être question d’autre chose que des Bourbons.

Je sortis aussitôt avec le maréchal, et nous ne tardâmes pas à apprendre qu’en effet une partie du corps d'armée du duc de Raguse, commandée par Souham, avait, seule, consommé son indigne trahison. Mais cette division ne pouvait même être soupçonnée, car ce fut à son insu qu’elle servit des projets hostiles à la France. Le désespoir -et la confusion du maréchal Ney furent extrêmes : plus de négociations possibles. Le même soir, au Sénat, Talleyrand fit proclamer Louis XVIIL.

Que fera le maréchal? Ira-t-il auprès de l’Empereur expier le mal qu’il lui a fait en provoquant son abdication? Restera-t-il à Paris, étranger à l’ordre des choses qui va s’y établir? Non : il voit son pays; il est témoin des transports de joie que le retour des Bourbons occasionne; il reconnaît