Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

CAMPAGNE DE 1807 : EYLAU, FRIEDLAND 84

Bernadotte se porta le 25 sur Mohrungen, en chassa les Russes, qui s’y étaient avancés, et continua le 26 son mouvement en avant. Notre corps d'armée arriva ce jour-là dans cette petite ville. À notre entrée, nous trouvâmes que toutes les maïsons étaient envahies par les soldats Je me pré-

cipitai dans une chambre; quinze ou vingt jeunes

filles étaient agenouillées autour d’une dame qui, en me tendant les bras, implora ma pitié. Je refermai la porte, cherchai un autre gîte, et, le soir, je fis porter de la nourriture à ces pauvres enfants. Cette scène s'était déjà renouvelée plusieurs fois sous mes yeux; il arrivait souvent qu’une soldatesque effrénée se précipitait sur les femmes sans défense. Tels sont les maux qui suivent inévitablement la guerre.

Le 31 janvier, l’armée française acheva de lever ses quartiers d'hiver; le VI* corps, celui du maréchal Ney, fit sa réunion à Gilgenburg. Le 3 février, nous étions en face de la ligne ennemie devant laquelle nous formions la gauche de l’armée française. Nous nous attendions à une bataille, mais seulement un engagement de peu d'importance eut lieu, et le maréchal Ney s'empara 26, suivi de près par la cavalerie et les avant-gardes russes : Benningsen, commandant en chef, reprenait à ce même moment l'offensive en se portant contre la gauche française.

Aussi les ordres de l'Empereur, du 27 janvier, prescrivirentils le mouvement en avant de tous les corps d'armée en vue d’une contre-offensive générale qui aboutit à Eylau. (Voir la Vie

militaire du maréchal Ney, par M. le général Bonnal, Paris, 1911). (Note de l'éditeur.)