Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

UN GENTILHOMME D’AUTREFOIS 5 se laisser dépérir de langueur, il se présenta, certain soir, après le spectacle, à la loge de la Beaumesnil, qui le congédia sans vouloir l'entendre. Cette défaite exalta son désir : il fit savoir à l’actrice qu'il était prêt à toutes les folies, etil lui offrit, le plus sérieusement du monde, sa main et son nom, faisant valoir qu'il serait riche un jour, étant le seul héritier d'un certain monsieur de la Belinaye..…. La Beaumesnil apprit ainsi que l’amoureux enseigne était le neveu de son protecteur. Soit qu'elle fût bonne fille et n'eût pas d'ambition, soit qu’elle craignit d'échanger une situation assurée contre un avenir aléatoire, elle adressa au jeune officier un sermon quasi-maternel et, sans rien révéler de sa liaison avec la Belinaye, lui représenta qu'un tel mariage compromettrait à tout Jamais sa situation dans l’armée et mettrait sa famille au désespoir. Sa conclusion fut qu’elle lui fermait sa porte et lui interdisait de la revoir.

Avec une ténacité d'illusions peu commune, la Rouërie porta ce refus au compte de la vertu et de la délicatesse de sa belle, et son amour s’en accrut. Une nuit, il se dirige, escorté de deux couvreurs, portant une échelle vers la maison qu’elle habite !; elle lui a défendu sa porte, il entrera

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1. L'Almanach des spectacles nous indique les logements suecessifs de M! Beaumesnil : rue Traversière, quartier Saint-Honoré,