Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

1% LE MARQUIS DE LA ROUËRIE

pour le moment, de marquer l'influence que ce roman vécu exerça sur son caractère : le commandement d’une troupe d'irréguliers, la liberté absolue de ses mouvements, la guerre de surprise et de ruses, les nuits passées à l’'embuscade, l'attrait du danger, les campements improvisés, cette existence de partisan, sans souci du bienêtre ni du lendemain, sans loi, sans préjugés, sans sujétion, entrait si bien dans ses goûts qu'elle lui valut rapidement la réputation d’un héros, en même temps qu'elle le rendait impropre à se plier désormais aux étroites obligations de la vie européenne. En peu de temps, le nom du colonel Armand, — c’est celui qu’il avait adopté, — devint aussi populaire parmi les insurgents, que le nom de Lafayette. En 1780, le marquis de Chastelux, au cours de son voyage aux ÉtatsUnis, eut l’occasion de diner chez M. de la Luzerne avec le colonel Armand, « cet homme célèbre en France, dit-il, par sa passion pour M'°B..., et qui l’est, en Amérique, par son courage el sa capacité! ».

La Rouërie plaisait aux indigènes par la simplicité avec laquelle il avait su se plier aux mœurs

1. « Il alla, ajoute Chastelux, s'ensevelir dans une célèbre et profonde retraite ; mais il en sortit bientôt : son caractère est gai, son esprit agréable, et personne ne voudrait qu'il se fût voué au silence. » — Voyage de M. le marquis de Chastelux dans l'Amérique septentrionale.