Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

LA CHAMBRE DE LA NOBLESSE (1788-1789). 57

D'Antraigques avait signé leur arrêté; il le fit même imprimer à Paris et présenter aux ministres (1). Puis, revenant à sa polémique locale, il lança un second mémoire expressément dirigé contre les États du Languedoc ; et tandis que le Parlement de Toulouse et la Cour des aides de Montpellier continuaient à dénoncer cette assemblée comme illégale, lui la déclarait inhabile à élire les députés aux États généraux : « Ou nous aurons, s'écriait-il, le choix libre de nos représentants dans chaeune de nos sénéchaussées, ou nous n’aurons pas de représentants légaux aux États généraux, et en ce cas, ne coopérant point à leurs décrets, ils ne sont point obligatoires pour nous. » L'arrêt du conseil du 24 janvier Jui donna satisfaction; il décida que, dans toute la France, les députés seraient élus par les électeurs de chacun des trois ordres, au chef-lieu de chaque bailliage.

D'Antraigues était toujours regardé, sur la foi de ses déclarations, comme un des meneurs futurs de la révolution bourgeoise; mais déjà il reniait presque ouvertement son Mémoire. À part sa haine contre les États du Languedoc, aucun des sentiments qui l'avaient inspiré ne survivait en lui. Sa noblesse ne remontait pas bien haut; il ne s’en rappelait pas moins fout à coup que l'existence politique de la noblesse était, de temps immémorial, un article essentiel de l'ancienne constitution. Comme Necker, il accordait d'avance au tiers l'égalité de tous devant l’impôt, et se figurait par cette concession réduire au silence, dans les prochains États, les ennemis de l'ancien régime. Beaucoup de nobles, à son exemple, qui naguère tonnaient contre la Cour dans les

(1) Il en envoie copie à Paris le 30 décembre. (A. N., AA ##, n° 326.