Vergniaud : 1753-1793
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qui a de bonnes raisons pour conserver toute sa vie à votre égard l’amitié la plus vive et la plus tendre. »
Plusieurs années se passent; la clientèle augmente chaque jour, et les plaideurs du Limousin ne sont pas les derniers à confier leurs intérêts à leur éminent compatriote. En 1789, Vergniaud dont le talent est à son apogée et qui peut écrire : « Je n'ai pas le temps de respirer, je me suis emparé de toutes les audiences », est devenu une des personnalités les plus connues de la grande cité girondine. On va l'entendre assidûment, et nous verrons tout à l'heure que, malgré la solennité des audiences du Parlement, on n'hésite pas à l’applaudir.
« Dans la foule, dit un de ses biographes bordelais qui rapporte assurément le souvenir de quelque contemporain, Vergniaud n’eût arrêté les regards de personne ; sa figure était sans expression, sa démarche languissante; mais à la barre, sa stature robuste, ses larges épaules donnaient de la majesté à la pose de l’orateur. Alors, il portait la tête haute, ses yeux noirs, sous des sourcils proéminants, se remplissaient d'éclat, ses lèvres épaisses semblaient modelées pour jeter la parole à grands flots, l'ampleur et la pureté de son organe, son geste calme réservé au début, toujours large et noble ajoutaient au prestige de sa brillante parole... (1). »
Pour na dette de ce portrait, il suffit de le rapprocher de celui tracé par son neveu, M. François Alluaud, qui n'oublia jamais le visage de celui qu’il avait embrassé une dernière fois, à la Force, quelques semaines avant sa mort.
(1) Le barreau de Bordeaux, de 1775 à 1818, par M. Henri Cuausor, avocat; p. 97.