Cayer commun des trois ordres du Bailliage de ***

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Auf ne voit-on fouvent dans les uns qu'un vuide effrayant , & dans les autres qu'une compofition plus effrayante encore.

Quelle expérience en effet , quelles lumières, quelles connoïflances peut-on attendre d’hommes prefque toujours oififs , dévoués par leur état à manquer d’occupations , & qui ont rempli tous les devoirs de leurs charges, quand ils ont confacré à leurs fonctions quelques heures dans une femaine? Ce font les affaires qui forment, qui inftruifent le magiftrat , & il reftera dans une ignorance humiliante pour lui & funefte au public , tant qu’il ne trouvera pas dans le noble exercice de fes devoirs un motif & un moyen continuel d'inftruion.

Auflitôt qu’un cultivateur commence à 2ugmenter fa fortune par fon induftrie, l’ambition de pofféder une charge lefaifit, ou s'empare de fon fils : il abandonne fes utiles travaux au moment où il feroit en état de leur donner plus d'a&tivité ; & fes champs que fon aifance lui donnoit les moyens de fertilifer , laiflés à des laboureurs pauvres, reftent condamnés à une culture médiocre. À la vanité de fe voir décoré d’une charge, fe joint l'intérêt de jouir des droits qui en dépendent. À ces nombreux offices font attachés des priviléges, des exemptions qui foulagent les citoyens les plus aifés pour faire retomber fur le pauvre peuple le fardeau qu’ils devroient fupporter. Triltes effets de cette multiplicité de due | s'ils reftent déferts, c’eft au détriment de la juftice qu’ils doivent; s’ils fe rempliffent, c’eft